Surveillance, collecte de données : la France tente d’aller toujours plus loin !


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Surveillance, collecte de données : la France tente d’aller toujours plus loin !

Sous couvert de l’état d’urgence sanitaire, la France multiplie des initiatives plus liberticides les unes que les autres, en tentant d’aller au-delà de la réglementation européenne.
 
Par Yannick Chatelain.
 
Comme le titrait le journal Le Monde sous la plume de Jean-Baptiste Jacquin : « Paris pousse le Conseil d’État à défier la justice européenne sur les données de connexion ».
 
Collecte de données : la demande française
En effet, le Conseil d’État doit se prononcer courant avril sur la conservation généralisée des traces des communications numériques laissées par l’ensemble de la population française. Ni plus ni moins.
 
Au milieu du tumulte et du chaos, une fois encore le Conseil d’État est « agressé » et je pèse ce mot tant l’initiative de l’exécutif au regard de la situation actuelle – où tous les regards sont tournés vers une vaccination brinquebalante  – apparait comme nulle et non avenue et place le Conseil d’État comme dernier rempart de dérives – en matière de contrôle et de surveillance – qui s’accumulent à l’abri du regard des citoyens.

Pour rappel à ceux et celles qui sont à l’initiative de cette audacieuse démarche : selon la Cour de justice de l’UE, les États européens ne peuvent pas réclamer aux opérateurs une collecte massive des données de connexion à des fins judiciaires et de renseignement. 
 
L’exécutif français peut relire le texte de la cour de justice dans un sens comme dans l’autre sa requête ne fait pas sens et ne peut juridiquement cohabiter.
 
Sous couvert de l’exercice d’un « pouvoir absolu » – qui ne dit pas son nom – conféré à l’exécutif par l’état d’urgence sanitaire, ce dernier ne cesse de multiplier des initiatives plus liberticides les unes que les autres.
 
Certes tout peut être osé, mais à une telle cadence et dans les moments si terribles que nous traversons, sans le moindre débat public – que celui qui lit ce texte hors les lecteurs du Monde – se dénonce, cela devient alarmant.
 
Une demande de la France, vouée à l’échec ?
Est-il utile de rappeler que dans cette dynamique de desiderata de l’exécutif français soumis au Conseil d’État les personnes en EHPAD ont échappé in extremis à l’emprisonnement, le Conseil d’État s’y étant formellement opposé.
Je n’ai pas souvenir d’avoir vu cette démarche pour le moins inhumaine de mon point de vue, faire la Une des médias de masse. Pour autant, nos institutions ont fait rempart et le Conseil d’État a suspendu la possibilité d’une interdiction générale et absolue de sortie des résidents d’EHPAD.
 
Cette nouvelle initiative sur nos données personnelles est a priori vouée à l’échec, si tant est que le Conseil d’État recadre une nouvelle fois les choses. Toutefois cette  énième initiative attentatoire à des libertés fondamentales ne peut être passée sous silence.

Au regard de l’arrêt rendu le 6 octobre 2020 par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) qu’une telle demande puisse être émise et défier ainsi le Conseil d’État ne laisse malheureusement que deux options à l’honnête homme : soit cette demande est le reflet d’une méconnaissance des plus absolues de décisions prises par la Cour de justice européenne, décisions qui s’appliquent à tous les États membres, soit, et ce serait là le plus inquiétant, cette initiative fait montre d’un mépris absolu de ces décisions, pour tenter de les contourner et aboutir à un toujours plus de surveillance de la population française.
 
Dans les deux cas, ne pouvant naturellement préjuger de l’intentionnalité d’une telle nouvelle attaque à des droits fondamentaux des citoyens français, l’exécutif – tout du moins certains de ses membres – de par leurs initiatives posent un grave problème à notre idéal démocratique : soit ils sont dans l’ignorance des lois ; soit, profitant de la « dictature temporelle » (Hannah Arendt) instaurée par un État d’urgence,  ils pensent être en position d’outrepasser le droit européen. Soit les deux !
 
Surveiller, avec les meilleures intentions ?
Certes, l’enveloppe de vente de cette tentative – nouvelle atteinte à des droits fondamentaux – se veut louable, tout comme l’enfer est pavé de bonnes intentions, la rengaine est désormais connue :
 
Permettre aux services de renseignement, à la justice et à la police de puiser, sous conditions, dans cette masse d’informations au gré de leurs besoins préventifs ou probatoires. Il s’agit aussi bien de pouvoir surveiller une personne soupçonnée d’amitiés terroristes que de vérifier a posteriori la présence d’une autre sur le lieu d’un cambriolage.
 
À moins qu’il ne s’agisse de surveiller des personnes qui ne partageraient pas l’autosatisfecit récurrent de l’exécutif dans sa gestion très critiquée de la crise sanitaire – un manque d’humilité constaté par de nombreux observateurs.
 
À moins qu’il ne s’agisse de se doter des moyens de surveiller des personnes qui, aujourd’hui réduites au silence, n’adhéraient pas hier au Nouveau Monde que l’exécutif souhaite façonner.
 
Pour rappel, un ancien membre de l’exécutif actuel avait pointé en novembre 2018 des séditieux parmi les Gilets jaunes. Une fois de tels mots prononcés contre des contestataires, alors… tout est permis à un pouvoir élu légitimement pour sanctionner quiconque au motif d’« atteinte à la sûreté nationale ».
 
En Russie – pour ceux qui ne verraient pas le danger que représenterait une telle transgression du droit européen –  critiquer une administration gouvernementale est désormais un délit selon les lois RUNET. Voulons-nous en arriver là ? Est-il acceptable sous couvert de lutte contre le terrorisme de s’arroger le droit d’espionner à l’envi l’ensemble des Français au mépris du droit européen ?
 
Je fais pleinement confiance à nos institutions et au Conseil d’État pour une nouvelle fois faire barrière à cette surprenante initiative. Toutefois celle-ci est la signature a minima d’une méconnaissance de certains membres de l’exécutif de principes auxquels les gouvernements européens doivent se soumettre, si ce n’est l’expression d’une dérive autoritaire pour ne pas dire totalitaire en conscience, tentant alors par tout moyen de mettre la population sous un contrôle exacerbé.
 
Quelle est la finalité de cette nouvelle tentative de transgression de la règle européenne par l’État français ? Seuls les initiateurs de ce nouveau coup de boutoir contre des libertés fondamentales ont la réponse. Toujours est-il que le Conseil d’État ne peut valider une telle demande outrancière niant le droit… si ce n’est moi, Victor Hugo leur en saurait gré !
 

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